[Série technique] – Episode 15 : Végétaliser une cour d’immeuble en pleine terre
publié le 09 juillet 2024
12 min
Végétalisation
Avec l’augmentation des températures estivales et la multiplication des périodes de canicule en été, il apparaît de plus en plus pertinent pour les personnes vivant en ville d’apporter du végétal dans leurs cours d’immeuble.
En effet, la végétation est réputée pour sa capacité à rafraîchir son espace environnant, notamment grâce au processus d’évapotranspiration qui la fait agir comme un brumisateur naturel.
Il s’agit également d’une solution intéressante pour apporter de l’ombre.
Enfin, les espaces végétalisés peuvent être le réceptacle des eaux de pluie qui ruissellent dans la cour et ainsi permettre de temporiser leur arrivée dans les réseaux d’assainissement.
Comment végétaliser sa cour d’immeuble en pleine terre afin d’en faire un îlot de fraîcheur pour les habitants de l’immeuble ?
Cette note compare différents PLU (Plan local d’urbanisme) principalement franciliens et met notamment en évidence quelques grandes caractéristiques communes de ces derniers dans la définition de la pleine terre. Ils sont souvent qualifiés de sols permettant une certaine infiltration de l’eau et ne possèdent pas de construction (ni en surface, ni en sous-sol).
Cet article ne traitera donc pas des sols reposant sur des caves par exemple, ou encore sur des parkings souterrains qui peuvent accueillir des espaces végétalisés étanches.
« Sur une cave il est possible de créer des fosses de plantation, il peut d’ailleurs être nécessaire de refaire l’étanchéité. Selon le projet et ses contraintes techniques, il faudra jouer sur les épaisseurs de substrat. »
Julien Nissou, Co-gérant de Urban Paysages
Faisabilité d’un projet : quels sont les éléments à prendre en compte au préalable ?
Lorsqu’on se lance dans la désimperméabilisation et la végétalisation d’une cour en pleine terre, il est nécessaire de vérifier différents paramètres avant de s’investir concrètement dans la conception du projet.
Quelle est l’épaisseur de la dalle béton ?
Cette donnée est importante pour connaître la quantité de matériel à retirer avant d’atteindre le sol. En effet, comme le montre l’illustration ci-dessus, un sol urbain se trouve sous un revêtement bitumé.
Végétaliser une cour d’immeuble en pleine terre implique donc la débitumisation de cette dernière, sauf si des espaces étaient déjà en pleine terre, mais cela n’est pas souvent le cas !
Comment sont évacuées les eaux pluviales ?
Certains réseaux d’évacuation passent sous la cour et il est important de les connaître afin de pouvoir en tenir compte lors de la réalisation des travaux.
M. Nissou nous explique que la connaissance de ces réseaux se fait principalement grâce à des plans. Cependant il est possible que ces plans ne soient pas disponibles, notamment dans le cas des bâtiments anciens, qui sont très majoritaires à Paris !
« Dans le cas du projet Soult, nous ne savions pas que les réseaux d’évacuation passaient sous la cour. Il s’avère qu’ils étaient non utilisés, c’est pourquoi nous avons pu les condamner. Sinon il aurait fallu les dévier, ce qui engendre des surcoûts. »
Julien Nissou, Co-gérant de Urban Paysages
La connaissance du principe de gestion des eaux pluviales dans la zone initiale de projet permet de pouvoir anticiper les éventuels travaux qu’il sera nécessaire de réaliser afin que les eaux ruissellent vers les futurs espaces perméables.
C’est notamment ce qui est préconisé dans le cadre du dispositif CoprOasis, qui exige un abattement des eaux de pluie courantes par la zone de projet.
Quelle est la nature du sol ? Sa composition ?
Il peut être nécessaire de faire une analyse de sol afin de connaître sa composition. M. Nissou explique que selon la composition d’un sol, on fera des choix spécifiques en matière de palette végétale, ce qui va également jouer sur la question de l’évacuation des eaux par infiltration : est-ce que c’est un sol drainant ? Argileux ?
Les grandes étapes d’un projet de végétalisation de cour d’immeuble – L’exemple du projet de la copropriété Soult
Démolition de la dalle existante
La 1re étape d’un tel projet est la démolition de la dalle en béton. Cette première phase peut durer 3 à 4 semaines en fonction de l’état actuel de la cour, mais également de l’accessibilité de la cour.
Dans le cas du projet Soult, il a fallu obtenir des autorisations auprès de la Mairie du 12e arrondissement afin de pouvoir occuper une partie de l’espace public pour évacuer les gravats. C’est pourquoi l’étude en amont est très importante afin de pouvoir anticiper cette éventuelle contrainte non négligeable.
Création d’une nouvelle dalle perméable avec revalorisation des matériaux
Après la démolition de la dalle, le béton est concassé et trié afin d’avoir le moins d’export de matériaux possible. Le but est de retravailler les matériaux issus de la dalle en béton afin de créer le fond de forme de la future dalle perméable filtrante. C’est également lors de cette 1re phase que les réseaux pour l’arrosage sont installés.
Enfin, au-dessus de cette dalle perméable, un stabilisé allégé en ciment blanc est ajouté avec une granulométrie et un tassage adaptés pour pouvoir circuler à vélo.
Création des sols qui seront plantés et construction des structures
Une fois que les espaces minéraux perméables ont été créés, place aux espaces plantés !
Les supports de culture sont ajoutés au niveau des espaces destinés à être plantés. Dans le projet Soult, une terre franche d’origine francilienne a été utilisée (terre composée à 60% de terre végétale et de 40% de compost végétal) sur les 50 premiers centimètres d’épaisseur. Ce type de terre permet au végétal de se développer. Il y a plus de terre végétale en épaisseur que de dalle concassée.
Selon les végétaux préconisés par le paysagiste concepteur dans sa palette végétale, il faudra un arrosage adapté. Dans le projet Soult, le choix s’est porté sur un système dit « goutte-à-goutte » assez minimaliste.
« Il faut limiter la consommation en eau, le goutte-à-goutte permet de cibler les végétaux avec un trou tous les 30 ou 40cm, on apporte environ 16L d’eau par heure. Quand il fait vraiment chaud, on apporte de l’eau 2 fois par jour pendant 30mn ».
Julien Nissou, Co-gérant de Urban Paysages
Enfin, si elles sont prévues dans le projet, les structures sont construites. Dans le cas du projet Soult, il y avait notamment des abris vélos et un espace pour les poubelles comme le montre la photo ci-dessous. Cette phase peut prendre 1 à 2 semaines selon les constructions à réaliser.
Dernière étape : les plantations
La meilleure période pour planter est l’automne :
Il y a plus de choix d’espèces dans les pépinières ;
Les végétaux sont en repos végétatif et ne souffriront pas de stress hydrique ;
Ce ne sont pas des périodes de fortes chaleurs ;
Le végétal va donc s’implanter correctement pour le printemps et l’été.
Les végétaux peuvent être cultivés en pot ou en pleine terre. La pleine terre permet d’accueillir toutes tailles de végétaux y compris des arbres.
Pour éviter l’évaporation de l’eau et limiter ce qu’on appelle « les mauvaises herbes » (les adventices notamment), M. Nissou nous explique qu’il est fréquent de mettre du bois raméal fragmenté (BRF), ou parfois des matières minérales.
« L’avantage du BRF c’est qu’il se décompose et apporte de la matière organique aux plantes ».
Julien Nissou, Co-gérant de Urban Paysages
Aussi, il est intéressant de choisir des plantes diversifiées qui vont apporter de la biodiversité.
Quel entretien des espaces faut-il prévoir ?
La question de l’entretien est très importante à anticiper dans le cadre d’un projet de végétalisation, afin d’assurer sa pérennité.
M. Nissou nous explique que la cour végétalisée de la Résidence Soult n’aura pas besoin d’un entretien très régulier, notamment parce qu’elle ne comporte pas de gazon. Les espèces plantées telles que le bouleau ou les hortensias ne nécessitent que 4 à 5 interventions annuelles, selon le rendu souhaité.
Le projet Soult comprend également une prairie fleurie. Toutes les cours ne peuvent pas forcément en accueillir, cela dépend des contraintes liées à l’ensoleillement, l’orientation, le type de sol mais également le budget consacré au projet.
Une prairie fleurie est composée de différentes espèces telles que :
Des espèces annuelles : elles fleurissent la 1ère année ;
Des espèces bisannuelles qui fleurissent 2 fois par an ;
Des vivaces. Elles vont accaparer un peu l’espace, il faut savoir les contenir !
Les prairies fleuries apportent une diversité intéressante. En fonction du choix de plantes, il faudra faire un regarnissage tous les 2 à 3 ans.
« Dans le projet Soult, nous avons une petite gamme avec plus d’annuelles que de vivaces : il faudra regarnir dans 2-3 ans. »
Retrouvez l’ensemble des épisodes de la Série technique rénovation :
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