[Série technique] – Episode 19 : Les alternatives possibles au gaz en copropriété

publié le 04 décembre 2024

11 min

Photo de la chaufferie du 20 rue d'Arcueil dans le 14e arrondissement.
Photo de la chaufferie du 20 rue d'Arcueil dans le 14e arrondissement. © Copropriété Arcueil

La rénovation énergétique en copropriété implique fréquemment une intervention sur le poste de chauffage. Alors que le gaz reste aujourd'hui une source d’énergie dominante en raison de son coût relativement bas, d'autres options émergent, portées par des impératifs écologiques et de nouvelles réglementations.

Cet article propose de faire un point général sur certaines alternatives au gaz en copropriété. Celles-ci pourront être détaillées dans des articles spécifiques.

A cette fin, un entretien a été mené avec Pierre Monteiro, référent chauffage à l’Agence Ile-de-France de l’entreprise Senova.

Le Réseau de Chaleur Urbain (RCU)

Qu’est-ce que c’est ?

Le Réseau de Chaleur Urbain (RCU) est un système collectif de chauffage où la chaleur est produite à grande échelle (usines de traitement des déchets, biomasse, géothermie, etc.) puis transportée via un réseau de canalisations vers les bâtiments raccordés.

Pourquoi envisager cette solution ?

Facilité de gestion

Une fois raccordée, la copropriété est libérée des obligations de maintenance complexes liées aux chaudières gaz telles que le ramonage ou le contrôle des rendements de combustion.

Des arguments financiers

Tout d’abord, l’investissement initial est réduit par rapport à la réfection d’une chaufferie gaz : le coût d’installation d’une sous-station, autour de 80 000 €, est souvent inférieur à celui des autres solutions.

À titre comparatif, la réfection d’une chaufferie gaz coûte aux alentours de 100 000 € pour les plus petites installations.

Pierre Monteiro, Senova

Aussi, le raccordement au RCU bénéficie de financements spécifiques, bien que les certificats d’économie d’énergie (CEE) soient souvent captés par le concessionnaire.

Grâce au classement du réseau de chaleur, certaines zones de développement prioritaire définies par les municipalités bénéficient de tarifs préférentiels sur le coût du raccordement. Dans ces zones, lorsqu’une copropriété effectue des travaux sur la chaufferie, elle est bien souvent dans l’obligation de se raccorder au réseau.

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Inconvénient principal : un coût récurrent élevé

La facturation inclut :

Quels sont les travaux réalisés lorsque l’on se raccorde au RCU ?

Le passage du gaz au réseau de chaleur urbain implique des travaux à la fois sur la copropriété en elle-même avec la création de la sous-station, mais également en voirie avec le raccordement au réseau :

La chaleur urbaine reste une source d’énergie pérenne et plus renouvelable que le gaz.

La pompe à chaleur (PAC)

Fonctionnement d’une PAC

Une pompe à chaleur (PAC) capte la chaleur présente dans l’air (aérothermie), l’eau (aquathermie) ou le sol (géothermie) et la transfère au réseau de chauffage et d’eau chaude du bâtiment. Elle nécessite une source extérieure (unités ventilées) et un système de distribution.

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Quelles opportunités sont offertes par la PAC ?

Tout d’abord, la PAC offre un bilan énergétique intéressant. En rénovation de copropriété, on opte souvent pour les solutions mixtes PAC-gaz, où la pompe couvre 70 % des besoins en chauffage.

En effet, il est rare de passer en 100 % PAC pour des raisons de disponibilité en électricité : l’approvisionnement en électricité est rarement dimensionné pour chauffer un bâtiment.

C’est pourquoi en hiver, dans ce type d’installation, la chaudière gaz intervient lorsque les conditions météorologiques ne le permettent pas et que la PAC nécessite un renfort.

Cette solution permet de réduire ses émissions de gaz à effet de serre car la source principale d’énergie devient l’électricité.

Une solution qui soulève des freins

Financiers

L’investissement initial est élevé : l’installation d’une PAC pour 50 logements coûte environ 300 000 €, auxquels s’ajoutent des études acoustiques et structurelles allant de 6 000 à 8 000 €.

Techniques

D’autres contraintes d’ordre technique sont également à prendre en compte :

La puissance nécessaire pour les grandes copropriétés dépasse souvent la capacité de raccordement actuel au réseau électrique, nécessitant des travaux de renforcement auprès d’ENEDIS (jusqu’à deux ans de délais).

Il est plus facile d’envisager une PAC lorsque l’on se trouve dans un immeuble comportant déjà un ou plusieurs ascenseurs impliquant une puissance disponible plus élevée que dans d’autres immeubles où la capacité de raccordement est faible.

Pierre Monteiro, Senova

La mise en place d’une PAC implique le grutage des unités extérieures ainsi que l’installation de baffles anti-bruit au niveau de la toiture.

C’est pour cela que des études de portance et acoustiques sont nécessaires afin de déterminer la capacité portante de la toiture et les nuisances acoustiques éventuelles.

La principale contrainte technique réside dans le fait qu’il y a une liaison à faire entre la chaufferie gaz qui est en sous-sol et les évaporateurs qui sont parfois situés en R+7 !

Pierre Monteiro, Senova

Urbanistiques

Les démarches administratives sont aussi à prendre en considération. Il est en effet nécessaire de déposer une demande préalable de travaux auprès de la mairie.

Dans une municipalité telle que Paris avec un patrimoine urbain important, l’installation des équipements liés à la PAC en toiture peuvent être contraints.

Travaux principaux réalisés lors du passage à la PAC-gaz

La transition vers une PAC-gaz implique la réalisation de plusieurs postes de travaux permettant l’adaptation de la chaufferie actuelle à un système PAC :

Installations en toiture dans le cadre de la mise en place d’une PAC-gaz. © Senova

Le bois

Se chauffer au bois : comment ?

Les chaufferies bois utilisent des chaudières fonctionnant avec des granulés, plaquettes ou bûches. Elles brûlent le combustible pour produire de la chaleur, qui est ensuite redistribuée dans le réseau de chauffage collectif.

Quels sont les principaux avantages de ce type d’énergie ?

Des freins non négligeables en copropriété, notamment à Paris

L’espace disponible : la contrainte majeure

En effet, il est nécessaire de prévoir un espace suffisamment grand pour stocker :

C’est pourquoi ce mode de chauffage est peu adapté aux grandes copropriétés : au-delà de 50 logements, l’espace nécessaire devient difficile à trouver, notamment en milieu urbain dense comme c’est le cas de Paris.

Le bois est finalement assez peu utilisé en copropriété, il est plutôt utilisé dans des établissements publics ou tertiaires.

Pierre Monteiro, Senova

Une maintenance coûteuse

L’installation d’une chaufferie au bois implique certaines contraintes logistiques telles que la gestion des cendres, ce qui explique des contrats d’exploitation plus chers.

De plus, il est nécessaire de prévoir une chaudière gaz d’appoint pour pallier le manque de réactivité du chauffage bois en cas de demande rapide.

Quels sont les travaux réalisés ?

Opter pour le chauffage bois, c’est procéder à l’installation de tout un système :

Etant donné le poids des chaudières, il est également nécessaire parfois de renforcer les structures pour supporter les équipements.

Le solaire thermique

Fonctionnement global du solaire thermique

Le solaire thermique consiste à capter l’énergie du soleil à l’aide de panneaux spécifiques pour chauffer un fluide caloporteur. Cette énergie est ensuite utilisée pour chauffer l’eau sanitaire ou le réseau de chauffage.

Solution ENR&R à faible impact

Le solaire thermique est une énergie renouvelable idéale pour préchauffer l’eau chaude sanitaire (ECS) et réduire la consommation globale d’énergie.

Sa qualité d’énergie renouvelable lui confère un faible impact environnemental.

C’est la seule énergie de chauffage que l’on peut qualifier de vraiment renouvelable aujourd’hui.

Pierre Monteiro, Senova

Points de vigilance d’un point de vue économique et urbanistique

Ce mode de chauffage a un rendement assez faible. Le solaire thermique ne couvre que 12 à 13 % des besoins énergétiques, ce qui limite son intérêt pour les grandes copropriétés.

Sa mise en œuvre est également compliquée en raison de contraintes urbanistiques et patrimoniales.
En effet, la surface disponible en toiture et les démarches administratives telles que la déclaration préalable en mairie et l’autorisation des architectes des bâtiments de France sont des points de vigilance à anticiper en copropriété.

Les travaux nécessaires lorsque l’on opte pour le solaire thermique

Le choix du solaire thermique se traduit concrètement par l’installation d’un système qui vient supplanter une installation existante.

Ce système est composé des éléments suivants :

Retours d’expérience de copropriétés ayant intégré des panneaux solaires thermiques dans leur projet de rénovation énergétique global.

Il est fortement recommandé de souscrire à un contrat de garantie de rendement solaire. Si cela a un coût pour la copropriété, celui-ci permet une garantie concernant le rendement de son installation. Si le rendement est inférieur à ce qui était prévu, alors une compensation financière sera versée à la copropriété, ou une intervention technique sera prise en charge.

Pourquoi le gaz reste dominant ?

Malgré ces alternatives, le gaz conserve une place importante en raison de son coût initial d’investissement relativement faible (100 000 € pour rénover une chaufferie existante) et d’une compatibilité immédiate avec les infrastructures existantes.

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Dans l’ordre, chez Senova, on observe en majorité la rénovation de la chaufferie gaz. On observe également beaucoup de raccordement au RCU, notamment en raison des obligations règlementaires. La PAC-gaz est également une solution que l’on observe de façon plus marginale. Le bois et le solaire thermique sont vraiment rares en rénovation.

Pierre Monteiro, Senova

Toutefois, les contraintes écologiques et économiques poussent certaines copropriétés motivées à explorer d’autres solutions.

Le choix d’une alternative à une chaufferie gaz dépend de nombreux facteurs :

Le RCU s’impose souvent dans les zones prioritaires, tandis que la PAC mixte gaz se positionne comme une solution intermédiaire pour les projets ambitieux.

Quelle que soit l’option envisagée, une étude de faisabilité détaillée est essentielle pour évaluer les coûts et les contraintes techniques.

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